Avril
(PR) – « Quatrième mois de l’année » : le Larousse comme le Robert sont d’une concision rarement égalée… Et pourtant, ce mois ainsi dénommé mérite qu’on s’y intéresse. Ne serait-ce que parce qu’aujourd’hui, premier jour du mois… Mais là on y reviendra ! Avril est aussi une période charnière entre la fin de l’hiver et le « vrai » printemps, celui qui annonce les beaux jours. Mais, attention ! Comme le dit l’adage, « en avril ne te découvre pas d’un fil »…
Une question s’impose : quelle est l’origine, l’étymologie de ce mot ? Commençons par notre référence traditionnelle, le « Dictionnaire universel » de l’ami Antoine Furetière. En 1690, il affirmait que « ce mot vient de aperilis, du verbe aperire, parce qu'en ce mois la terre semble s'ouvrir pour produire toutes choses. »
Le poète romain Ovide était du même avis concernant Aprilis ; il y ajoute même un aspect sympathique, puisqu’il prétend que ce mois-ci, « c'est la bonne saison où tout est éclos (aperto tempore), et où la bonne Vénus met la main sur ce mois et le revendique ». Sachant que le mois précédent, Mars, était celui du dieu guerrier mieux vaut Vénus et l’amour qu’elle symbolise pour nous faire espérer, à partir d’aujourd’hui, de belles journées, sans giboulées.
Pour le « calendrier républicain » concocté par Fabre d’Eglantine (un nom prédestiné…), la période correspondant à notre mois d’avril était celle de « Germinal ». Fabre avait bien vu puisque ce « Germinal » arrivait après « Ventôse » (mars) et précédait « Floréal ». Là, on passe au mois de mai, où, selon un autre adage, « fais ce qu’il te plait »…
En ce tout début du mois d’avril, un souvenir d’il y a juste cinquante ans me revient en mémoire : dans la soirée du mardi 2 avril de 1974, on apprenait tardivement le décès de Georges Pompidou, président de la République française. Ce soir-là, il ne fallut pas traîner, le journal ne doit pas prendre de retard et l’exercice était d’autant plus compliqué qu’à l’époque l’on travaillait pratiquement comme du temps de Gutenberg !
Autre chose, l’ami Furetière, source inépuisable, affirme d’autre part que : « On dit figurément, qu'un homme est en l'Avril de ses jours, pour dire, qu'il est en la fleur de sa jeunesse, au printemps de son âge, à cause qu'Avril est toûjours au printemps ». Par charité, il ne dit pas quel mois s’applique à ceux dont la « fleur de la jeunesse est fanée » – je n’ai pas dit à celles…
Bien évidemment, puisque ce « mot » est publié un premier avril, on ne peut pas éluder la question du « poisson » qui s’attache à ce jour précis. La tradition en remonterait au XVe siècle, et la très sérieuse Académie française en fournit une explication dans son édition de
1718 par l'intermédiaire de la locution « donner un poisson d'avril » qui signifie « obliger quelqu'un à faire quelque démarche inutile pour avoir lieu de se moquer de lui ».
En réalité, c’est depuis l’Antiquité que cette période est propice aux canulars, pendant les fêtes multiples et variées qui marquaient l’arrivée du printemps après les rigueurs de l’hiver. Chaque pays a ses traditions, et je ne peux m’empêcher de signaler qu’en Russie on parle de « Den’ Dourakov » ou « jour des fous » – bonne fête Stalpoutine !
Les chrétiens auraient ajouté le poisson non pas parce qu’il était à la fois le symbole du Christ – ichtus, acronyme en grec ancien de « Jésus-Christ, fils de Dieu, Sauveur » – mais surtout parce qu’ils en avaient assez du poisson, seule « viande » autorisée pendant le Carême… D’ailleurs, Furetière (encore lui…) ajoute que « On appelle Poisson d'Avril, un poisson de figure longue & menuë dont on fait une pesche fort abondante en cette saison, qu'on nomme autrement Maquereau : & parce qu'on appelle du même nom les entremetteurs des amours illicites, cela est cause qu'on nomme aussi ces gens-là Poissons d'Avril. » Vous le saviez ? Pas moi !