Téléfon
(PR) – « Titre d’une chanson écrite, composée et interprétée par Nino Ferrer en 1967 ». Même les plus jeunes de mes lecteurs doivent se souvenir de ce fameux « Gaston, y’a le téléfon qui son ». Mais alors, pourquoi faire de ce drôle de mot celui de la semaine ? Si vous vous souvenez bien, la suite de la chanson est « Et y’a jamais personne qui y répond » ! Et alors, allez-vous me redemander, quel rapport avec le « mot » de cette semaine ? Je vais essayer de vous expliquer, accrochez-vous…
Le mardi 6 février, cette semaine, on célèbre, selon le calendrier catholique, la fête de Saint-Gaston. Evêque d’Arras, connu dans l’idiome flamand comme Saint Waast, il aurait été le catéchiste du roi Clovis. Pas de rapport apparent avec le « téléfon » ; sinon qu’il aurait pu apprendre au souverain franc « ne coupez pas » avant l’affaire du vase de Soissons…
Je ne pense pas que Nino Ferrer, artiste très sensible, ait eu une raison particulière de choisir Gaston pour sa chanson, à part pour la rime. Mais celle-ci a inspiré une association qui, en 2003, a décidé de créer une « journée mondiale sans téléphone mobile ». Avec une bonne dose d’humour, la première eut lieu le 6 février 2004, en embauchant Saint-Gaston comme parrain !
Homo sapiens a toujours rêvé de pouvoir communiquer à distance. La première solution « moderne » vint à la fin du dix-huitième siècle avec le télégraphe Chappe. Doté de sémaphores, il permit, par exemple, d’envoyer un message de Strasbourg à Paris en deux heures au lieu de quatre jours avec un coursier à cheval !
Mais voilà, le système était lourd, pas assez rapide. Il fallut attendre que la « fée électricité » s’en mêle, et après des expériences et des tâtonnements multiples et variés, arriva le jeune Samuel Morse. Il s’était inspiré de toutes les tentatives précédentes, et déposa en 1840 le brevet d’un télégraphe électrique associé à un code qui allait porter son nom et que tous les marins, contrôleurs aériens et… boy-scouts ont appris à utiliser. La conquête de l’Ouest allait populariser au cinéma les « tic tac » qui perforaient des rubans de papier…
Bravo, les …- - -… (SOS) allaient pouvoir sauver des vies (pas pour le « Titanic », hélas !). Mais il manquait le meilleur outil de communication entre les êtres humains : la voix. Au dix-neuvième siècle, les expériences se multiplièrent et, en 1876, Alexander Graham Bell démontrait à New York qu’on pouvait transmettre une conversation sur une ligne électrique. L’année suivante, le premier réseau commercial débutait Outre-Atlantique. Les perfectionnements allaient suivre, mais on restait toujours tributaire du fil de cuivre. C’était vraiment le « téléfon » de nos jeunes années !
Dans la deuxième partie du siècle dernier le téléphone commença à devenir « mobile ». D’abord assez volumineux, il finit par tenir dans la poche, puis par devenir « smart » - « intelligent ». A part le café, il peut faire plein de choses, même téléphoner ! Les ventes ne cessent de se multiplier, et l’association qui a lancé cette « journée sans téléphone mobile » demande donc que l’on réfléchisse sur l’utilisation faite de ce « bijou technologique ». Elle alerte (entre autres) sur les atteintes à l’environnement provoquées par la recherche de métaux rares, et donc par l’exploitation des enfants « par des multinationales peu scrupuleuses ».
Par un hasard de l’Histoire, cette initiative a été lancée au moment même où naissait Facebook, qui compte désormais plus de trois milliards d’inscrits… Combien d’entre eux éteindront leur « téléfon » ce mardi 6 février ? Après tout, Nino Ferrer concluait sa chanson par…
« Gaston, peut-être bien
qu’c’est importon… »