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Amour

PR) – « Sentiment vif qui pousse à aimer (qqn), à vouloir du bien, à aider en s'identifiant plus ou moins », nous dit le Robert. Je vous voir venir : pourquoi en faire, aujourd’hui, le « mot de la semaine » ? Ne devrait-il pas plutôt être un « mot perpétuel » ? Bien sûr, mais, si vous ne le saviez pas, on fête, le 9 août, « Saint-Amour ». Alors je me suis dit qu’à travers la fête de ce saint, on pouvait rendre hommage à l’un des plus beaux mots de la langue française – si ce n’est le plus beau


    Question préalable : qui est donc ce Monsieur Amour devenu saint ? On ne peut pas se fier aux « sources », comme on dit en termes journalistiques, qui ne sont pas vraiment abondantes. Selon le « Dictionnaire d’histoire et de géographie ecclésiastiques », Saint-Amour est honoré en Franche-Comté avec Saint-Viateur le 9 août et le 22 septembre. Leurs vies sont, paraît-il, légendaires. Ils faisaient partie de la légion thébaine. Celle-ci avait été envoyée dans le Valais – pour les non-initiés, c’est la vallée du Rhône en Suisse avant que celui-ci ne fasse un tour dans le lac Léman puis, après avoir salué Genève, continue jusqu’à la Méditerranée.

  Dans cette belle région, le catholicisme commençait à se répandre au troisième siècle après J.-C., et l’empereur Dioclétien avait envoyé Maximien et sa légion mettre de l’ordre. Amour et Viateur, tous deux officiers dans cette armée, se seraient opposés à un massacre parce qu’ils s’étaient secrètement convertis. Ils furent exécutés. Leurs reliques auraient été rapportées en Bourgogne deux siècles plus tard par le roi Gontran, le 9 août 585. Il avait fait le vœu de les enterrer dans la première ville de son royaume où il arriverait de retour du Valais et de leur élever une église. Ce fut à Vinciacum, dans le Jura français, qui devint donc ensuite Saint-Amour…

   Dix siècles plus tard, Antoine Furetière, dans son « Dictionnaire universel » de 1690, ne parle pas de la cité jurassienne, mais multiplie les définitions du mot « amour ». Bien sûr, il rappelle que « l’amour divin est le seul qui doit nous enflammer ». On ne sera pas surpris qu’il ajoute que l’amour « se dit principalement de cette violente passion que la nature inspire aux jeunes gens de divers sexes pour se joindre, afin de perpetuer l'espece ». Dans le même registre, il souligne que « on dit, qu'une femme fait l'amour, quand elle se laisse aller à quelque galanterie illicite. »

   Les ouvrages contemporains sont moins prolixes que notre ami Antoine qui évoque encore « la Divinité fabuleuse des Payens, qu'ils s'imaginoient presider à l'amour. Cupidon est le Dieu d'amour. L'Amour est tout nud. les flambeaux de l'Amour, les flesches de l'Amour, l'Amour est aveugle. »

   Il existe, bien évidemment, de multiples raisons de parler de l’amour – sinon de parler d’amour comme dans la chanson de Lucienne Boyer… A ce propos, on peut s’étonner que ce mot soit masculin au singulier, et devienne féminin au pluriel – les « amours mortes ». Il n’y a que deux autres mots de la langue française à avoir la même particularité, à savoir orgue et délice. Cela avait permis à un auteur de chansons, Albert Willemetz de jouer sur les mots en disant : « il est singulier que le mot amour ne soit féminin qu’au pluriel… »

   On doit bien sûr relever que, pour célébrer l’amour, il existe un autre moyen que de visiter la belle cité jurassienne de Saint-Amour – même si, comme le dirait un guide célèbre, elle « vaut le détour »… On peut également se rendre à Saint-Amour-Bellevue, village du Beaujolais. L’appellation « Saint-Amour » fait partie des dix crus classés de cette région. Certes, il n’est pas bourguignon, mais il vaut, lui aussi, le détour ! Sauf que, contrairement à l’amour, c’est à consommer avec modération…

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