Ver
(PR) – « Petit animal au corps mou, sans pattes », nous dit le Robert, et, une fois de plus, vous allez vous demander pourquoi j’ai choisi ce mot ? Tout simplement parce que ce 21 octobre est la « Journée internationale du ver ». Une célébration que l’on doit à la très sérieuse « Earthworm Society of Britain », soit la « Société anglaise des vers de terre ». Bien sûr, on peut être tenté de dire : « Ah, ces Anglais, ils ne savent pas quoi inventer »… Peut-être, mais les vers de terre, eux, sont plus utiles qu’on ne le pense…
D’abord, ils sont présents pratiquement partout dans nos sols, et il paraît que leur poids représente la masse la plus importante d’êtres vivants sur la planète ! Il y aurait plus de 7'000 espèces de « lombriciens », ces petits « reptiles » que tout gamin des campagnes a parfois recherché pour aller taquiner certains poissons, mais que l’on ne trouve guère dans les banlieues des grandes cités…
Il y a quelqu’un qui s’est beaucoup intéressé à ces vers de terre, c’est un dénommé Charles Darwin. Le « pape » du système de l’évolution a longuement étudié les lombrics, et en a tiré la conclusion qu’il est « permis de douter qu’il y ait beaucoup d’autres animaux qui aient joué dans l’histoire du globe un rôle aussi important que ces créatures d’une organisation aussi inférieure ». Fermez le ban, les vers de terre ont reçu la légion d’honneur darwinienne !
Ils le méritent, puisqu’ils sont présents sur notre bonne vieille Terre bien avant nous : depuis le « Précambrien », ce qui fait au moins 600 millions d’années. Cela veut dire qu’ils auraient mieux résisté que les dinosaures, comme quoi il vaut mieux être petit et caché…
Mais alors, pourquoi sont-ils si intéressants ? Apparemment parce que ce sont des sortes de « terrassiers-draineurs » qui préparent nos sols pour les ameublir, les aérer. Bref, sans eux on ne sait pas si l’on pourrait vraiment cultiver des légumes dans une terre qui serait comme du béton, compacte et impossible à fertiliser. Sans leur travail « anonyme », les racines ne pourraient pas s’enfoncer, l’eau ne pourrait pas irriguer, et l’on serait privé de beaucoup de légumes que l’on retrouve dans nos assiettes – et que l’on nous encourage, d’ailleurs, à consommer !
Mais nos braves lombrics ont, bien entendu des prédateurs qui peuvent les empêcher de mener à bien leur travail dans le sol. On citera, par exemple, les taupes qui, lorsqu’elles effectuent leur travail de tunnelier, peuvent se régaler d’un petit ver qui se trouve sur leur chemin. Lorsqu’ils sortent un peu de la terre, il y aussi (entre autres) des oiseaux qui les guettent. Par ces temps pluvieux que nous connaissons, les vers ont tendance à sortir le nez pour prendre l’air, mais on voit très vite des hérons (au long bec emmanché d’un long cou…) ou des corbeaux qui viennent faire leur marché.
L’agriculture moderne ne ménage pas, elle non plus, les lombrics. Les labourages profonds et violents, que l’on connaît aujourd’hui, ne facilitent pas le travail que les vers effectuent depuis des millions d’années. Mais il s’agit là, dit-on, d’un impératif de rendement, donc de rentabilité…
Notre ami Furetière, dans son « Dictionnaire universel » de 1690, avait de savoureuses descriptions de ce qu’il voyait d’abord comme un « petit animal qui vient de corruption des chairs ». Il évoquait aussi les « animaux qui s’engendrent dans les fruits », les « vers à soye ».
Mais il faut bien qu’il y ait une morale à cette histoire, toujours selon Furetière : « On appelle figurément ver, le remords de la conscience, parce qu’il ressemble à un ver qui nous ronge le cœur incessamment ». A bon entendeur…