Vendémiaire
(PR) – « Premier mois de l’année républicaine, commençant à l’équinoxe d’automne (suivant les années le 21, 22 ou 23 septembre) et finissant le 21, 22 ou 23 octobre » nous dit le Larousse. Eh bien, nous y sommes, et c’est l’occasion d’évoquer ce « calendrier républicain » qui n’eut qu’une vie plutôt brève, mais qui témoignait de la volonté des révolutionnaires de 1789 de créer un nouveau cadre de vie pour la France, et, pourquoi pas, pour le monde entier – une spécificité bien française !
Une fois la monarchie absolue abolie et la République proclamée (en 1792), la Convention, qui avait mis en chantier le système métrique – là aussi une vraie révolution – l’idée vint de mettre au point un calendrier qui ne soit plus lié au christianisme.
On créa donc un groupe de travail qui suggéra, sur le rapport d’une commission (déjà…), de créer une année de douze mois de trente jours, avec des semaines de dix jours, le dixième étant un jour de repos (pas de semaine de trente-cinq heures à l’époque…). Pour faire bon poids, on rajoutait cinq ou six jours à la fin de l’année.
Il fallut ensuite dénommer ces nouveaux mois. Philippe-François-Nazaire Fabre, plus connu sous le nom de Fabre d’Eglantine, poète, acteur, dramaturge présenta un projet qui fut adopté. Il avait bourlingué dans toute la France et l’Europe, passant même par Genève – il y composa un poème, « La treille de Genève » – et s’était fait connaître en composant l’immortel « Il pleut, il pleut bergère »…
Est-ce pour cela qu’il fut, dit-on, guidé dans le choix des appellations en « marquant les époques et les fractions de l’année par des signes intelligibles ou visibles pris dans l’agriculture ou l’économie rurale ». Il faut dire qu’à l’époque la « révolution industrielle » n’avait pas encore sévi, et les références de la grande majorité des Français étaient tournées vers les campagnes.
Puisque nous sommes dans le mois de « Vendémiaire », celui qui est le premier de la nouvelle année se réfère aux vendanges, qui ont lieu à cette époque. Vient ensuite « Brumaire » à cause des brouillards courants en novembre, puis « Frimaire » puisque le froid commence à s’installer. L’hiver arrive avec « Nivôse » pour la neige, « Pluviôse » pour les pluies du début d’année, puis « Ventôse » – très imagé, non ?
Le printemps est bucolique avec « Germinal » (la sève monte), « Floréal » quand arrivent les pâquerettes et « Prairial » au moment de faire les foins ! L’été commence fin juin avec « Messidor » pour le temps des moissons, puis « Thermidor » pour les chaleurs d’août, et enfin « Fructidor » quand on peut aller cueillir les fruits…
Pour illustrer ce nouveau calendrier, on pourrait utiliser des tableaux de Fragonard, et, pour la musique, les « Quatre saisons » de Vivaldi s’imposent tout naturellement ! Les révolutionnaires avaient certes d’autres préoccupations, mais le système entra quand même en vigueur le 15 Vendémiaire an II (le 6 octobre 1793), il y aura donc deux cents trente ans ce vendredi.
Il sera en vigueur pendant douze ans, deux mois et vingt-sept jours, puisque Napoléon, qui voulait se réconcilier avec le clergé catholique rétablit progressivement le calendrier grégorien, puis, devenu empereur, supprima le « républicain » le 11 Nivôse an XIV (1er janvier 1806).
Dans son « Dictionnaire universel », un siècle plus tôt, Antoine Furetière ne pouvait rien dire de « Vendémiaire », mais pour Octobre il citait un joli épigramme en rapport aux vendanges :
Cy gist Jean qui baissoit les yeux
A la rencontre de gens sobres
Et qui prioit souvent les Dieux
Que l’année eust plusieurs Octobres.