Charivari
(PR) – « Bruit tumultueux de huées, de sifflets, de casseroles et d’autres objets que l’on faisait jadis devant la maison de ceux dont on désapprouvait la conduite », nous dit le Larousse. Cela résume bien, me semble-t-il, ce qu’endure, depuis quelques jours, le président de la République française lors de ses déplacements dans le pays, après l’adoption de la (très) controversée loi sur la réforme des retraites. Pour le premier anniversaire de sa réélection en 2022, on lui promet aujourd’hui un « charivari » de première classe…
C’est l’un de ses adversaires les plus résolus, Jean-Luc Mélenchon, chef des « insoumis », qui appelle à cette occasion à une « casserolade » du tonnerre devant les préfectures, sous-préfectures, mairies, bref tous les lieux où s’incarne la Répu-blique, et où il convient (selon lui) de lui faire savoir qu’il n’est plus « légitime » …
Il n’y a rien de nouveau sous le soleil de cette nation toujours aussi insatisfaite qu’est la France. Déjà du temps de Louis XIV, dans son « Dictionnaire universel » de 1690, Antoine Furetière définissait ainsi le « charivari » : « Bruit confus que font des gens du peuple avec des poësles, des bassins & des chauderons pour faire injure à quelqu'un. »
Il ajoutait deux autres définitions qui n’ont apparemment rien à voir avec la situation du président Macron : « Se dit aussi d'un bruit confus fait en debauche, ou dans des querelles domestiques. Le mary & la femme se battent souvent en cette maison, c'est un étrange charivary. quand ces dé-bauchés sont yvres, ils font de grands charivaris. » ; ou encore : « Se dit aussi ironiquement d'une mauvaise Mu-sique. Ce Musicien a fait un concert, qui étoit plûtost un charivary. »
Le concert des casseroles tel qu’il s’est orchestré à plusieurs reprises ces derniers jours en France pourrait presque entrer, toutefois, dans cette dernière définition. Ce genre de manifestations n’a rien d’inédit, surtout en France ! En 1841, François Gui-zot, fut accueilli dans sa bonne ville de Caen par des concerts de casseroles parce que – alors qu’il était ministre des affaires étrangères – il représentait un gouvernement qui voulait un peu trop « fouiner » pour augmenter les taxes fon-cières, donc pour accroître les impôts. Sept ans plus tard, lors d’un autre « chari-vari », Guizot sera emporté avec le roi Louis-Philippe par la révolution de juillet 1848.
Il y a un exemple significatif de « chari-vari » ailleurs dans le monde. On se sou-vient notamment, qu’au Chili ce fut, en 1972, le signal du ralliement des opposants au président Salvador Allende. Manifesta-tions de casseroles après manifestations de casseroles, le coup d’Etat de Pinochet allait suivre un an plus tard.
Rien ne prouve (heureusement !) que pareille menace pèse sur le président fran-çais. Même si Jean-Luc Mélenchon (tou-jours là pour souffler sur les braises…) appelle à « libérer les casseroles » ! Dans un pays qui a réussi à faire inscrire sa cui-sine au patrimoine mondial de l’Unesco, on ne pense pas que celles-ci soient vraiment menacées. Sauf, peut-être, par les inspec-teurs du fameux guide Michelin, qui vien-nent de priver l’une des vedettes du monde culinaire, Guy Savoy, de sa troisième étoile. Mais, que l’on sache, on ne l’a pas vu faire du « charivari » devant son presti-gieux Hôtel de la Monnaie, une casserole (en cuivre, bien sûr…) à la main.
Il y a quelqu’un qui avait réussi à mettre en paroles et en musique le « charivari », c’est Serge Lama. Il chantait ainsi…
« …avant toi, j’ai connu Nicole
Qui vivait dans ses casseroles…
« Quel charivari la vie avec toi… »
Macron devrait le susurrer à la France