(PR) – « Petit projectile muni d’une pointe que l’on jette à la main contre une cible », c’est ce que nous dit le Larousse. Rien de bien extraordinaire, c’est un jeu que l’on pratique dans presque tous les pubs outre-Manche. Mais la « fléchette », plus exactement le « dart », qui va retenir l’attention la nuit prochaine est d’un tout autre genre : elle doit essayer de dévier la trajectoire d’un petit astéroïde qui se balade loin, très, très loin de notre bonne vieille Terre. Les auteurs de science-fiction sont dépassés par la Nasa !
L’acronyme « Dart » dit bien ce qu’est l’objectif de la mission : « double asteroid redirection test », soit « test de déviation d’un astéroïde double ». Et c’est bien là que les choses se compliquent : « Dimorphos », le gros caillou visé – pas plus de 160 mètres de diamètre – est, en réalité, une « lune » de « Didymos », qui, lui, doit faire un peu plus de deux fois la Tour Eiffel.
Pourquoi a-t-on dépensé plusieurs centaines de millions de dollars pour envoyer une « fléchette » faire joujou avec un astéroïde et demi ? Parce que, depuis leur découverte au début du dix-neuvième siècle, les astéroïdes – en grec « qui ressemble à une étoile » – ont intrigué les astronomes. Is sont devenus carrément inquiétants lorsqu’on a eu la certitude que c’était la chute d’un gros astéroïde de plus de 12 kilomètres de diamètre qui avait provoqué, il y a 66 millions d’années – la disparition des dinosaures et de 75% de la vie sur Terre.
Certes à l’époque notre espèce n’était pas encore dans les tuyaux, de loin pas ! Mais, enfin, il y a longtemps que l’on se dit : si un engin pareil revenait se balader, on ferait quoi ? D’accord, nous avons aujourd’hui beaucoup de moyens pour observer les plus de 500'000 astéroïdes se baladant dans le système solaire. On peut analyser leur trajectoire actuelle, donc prévoir la future, et ainsi envisager de prendre les mesures nécessaires, y compris les plus radicales, pour éviter que se rejoue le coup des dinosaures.
C’est un scénario qui a déjà eu les faveurs d’Hollywood : avec « Armageddon » où les effets spéciaux étaient mis au service de Bruce Willis, capitaine d’une flotte de navettes spatiales comme la NASA n’en a jamais rêvé…
Avant d’en arriver là, il faut essayer de voir si, avec une grosse pichenette, on peut dévier un caillou menaçant la Terre. D’où la création de la « fléchette » partie le 24 novembre 2021 de Cap Canaveral. On a choisi, évidemment, un objectif qui, même si on échouait, ne viendrait pas troubler nos jours et nos nuits. Le problème est que le couple « Dimorphos » et « Didymos » se balade à onze millions de kilomètres et que, dans l’espace, on ne peut jamais aller tout droit. Il a donc fallu faire un passage vers Mars avant d’être sur la bonne orbite.
Et maintenant ? « Dart » n’est qu’une sorte de gros cube d’un mètre de côté et de 500 kilos, mais, puisqu’il est destiné à disparaître en s’écrasant, il a largué un mini-satellite italien, LICIA, qui filmera le crash. Et le football italien ne perdant jamais ses droits, « Milani » et « Juventas » seront largués pour renseigner les télescopes terriens. Tout cela en direct !
Dans trois ans, un satellite de l’Agence spatiale européenne, baptisé « Hera » – c’était quand même l’épouse de Zeus – ira faire un tour pour voir où en sont nos astéroïdes et si, à l’avenir, on peut utiliser une semblable méthode pour nous protéger…
On n’en était pas là lorsqu’en 1942, Hergé a commencé dans « Le Soir » la parution de ce qui allait devenir « L’Etoile mystérieuse », où un astéroïde menaçait la Terre. Les Tintinophiles remarquent que, pour la première fois, le capitaine Haddock s’écrie « mille sabords » . Il y avait de quoi !