(PR) – « Abréviation courante de timbre-poste » dit le Larousse, tandis que le Robert précise : « petite vignette qui, collée sur un objet confié à la poste, a une valeur d'affranchissement égale au prix marqué sur son recto. » Depuis l’annonce, jeudi dernier, que le « timbre rouge » destiné au courrier prioritaire ne sera plus utilisable à partir du 1er janvier 2023, c’est un peu plus de nos habitudes de vie qui disparaît, en tout cas – pour celles et ceux qui ne sont pas des « millenials », c’est-à-dire ceux qui sont nés après le 1er janvier 2000. Déjà qu’il n'y avait plus besoin de lécher les timbres pour les coller…
Dans les temps lointains, lorsque l’on voulait envoyer un « pli » – feuille de papier pliée et scellée – le paiement du transport de ce message écrit était réglé (en général) par le destinataire, mais l’expéditeur devait mettre une partie de la somme pour être sûr que le document parte (et arrive) bien.
Le terme de « papier timbré », nous dit l’ami Furetière dans son « Dictionnaire universel » de 1690, était « celui qui sert aux expéditions de Justice, parce qu'il contient au haut la marque du Roy. » En dehors de ces documents officiels, on ne sait pas comment, auparavant, Madame de Sévigné « affranchissait » les lettres qu’elle envoyait, au mitan du XVIIe siècle, à sa fille la Marquise de Grignan…
Rendons justice à nos amis anglais, ce sont eux, très pragmatiques, qui ont créé le premier « timbre-poste », payé par l’expéditeur uniquement. En mai 1840 fut mis en vente le « Penny Black », un timbre à l’effigie de la reine Victoria. Le succès de cette formule fut immédiat, et elle fut reprise bientôt par d’autres pays : dès 1843, le canton de Genève mit en service le « Double de Genève ». Après la création de l’Etat fédéral suisse en 1848, la Poste créa des timbres dont la valeur était fixée en fonction de la distance – encore du pragmatisme…
Et la France dans tout cela ? L’administration des postes a longtemps fait de la résistance lorsque fut proposé un système analogue à celui du Royaume-Uni ; il fallut attendre la « Révolution de 1848 » pour que, le 1er janvier 1849, naisse le premier timbre « Cérès » de 20 centimes.
A partir de là, et pour de belles dizaines d’années, le timbre allait faire le bonheur de ceux que l’on appelle des « philatélistes ». Il parait qu’on avait envisagé l’appellation de « timbrologues », mais cela n’aurait pas fait très sérieux…
Les administrations postales de tous les pays ont très vite compris quel bénéfice elles pouvaient tirer de la passion que ces petits carrés ou rectangles de papier pouvaient exercer sur les collectionneurs. Je ne pense pas qu’il y ait une famille où, à une époque ou une autre, on n’ait pas mis de côté des timbres pour le « petit », qui découvrait ainsi le monde avec les vignettes venues de partout et qui, devenu grand, empilerait les albums spécialisés et, parfois, ferait partie d’un club.
Les courriels, WhatsApp et autres Instagram ont petit à petit rendu de plus en plus onéreuse la distribution du courrier, vu sa rareté. En 1916, mon grand-père, mobilisé sur le front, faisait remarquer à ma grand-mère que c’était bien que ses lettres arrivent en deux jours. En pleine guerre !
Le système présenté par La Poste pour remplacer le courrier « prioritaire » avec le timbre rouge par une « e-Lettre » continue de nous emmener vers une déshumanisation de plus en plus grande des services publics. Fini le temps où Pierre Perret chantait : « Quand une postière vous dit « qu’est-ce que c’est ? » vous lui faites, un baiser… » J’avoue que j’ai pratiqué ce refrain avec bonheur (pas assez longtemps, hélas !). Et ceux qui me connaissent comprendront cette allusion…